L'Amour, La Guerre et L'Imbécile, voici le nom du troisième album d'Elista, porté depuis longtemps à mes yeux comme l'un des meilleurs groupes français en activité. Successeur de l'excellent Elista (2003) et du plus rock mais non moins agréable La Folie Douce (2006), cet album se veut réellement différent, selon le souhait du groupe de ne pas s'enfermer dans un même style. Cette fois, Elista a donc décidé de lorgner vers la pop dans son plus simple appareil, c'est-à-dire celle des chansons mélodieuses et surtout pas alambiquées. C'est parfois jouer sur la tangente, mais à ce petit jeu, Elista s'en tire plutôt bien.
Alors qu'on s'attendait à revoir le groupe arborer le fanion pop/rock qu'il avait posé il y a presque 5 ans avec La Folie Douce, Elista prend le contre-pied pour nous adresser un ensemble de chansons pop. Mais il ne faut pas s'y tromper : la qualité du groupe et de ses compositions permet à
L'Amour, La Guerre et L'Imbécile d'offrir un panel varié et étoffé. Alors, si je me permets de poser des réserves sur le titre vitrine de cet album,
La Saint-Valentin, sorte de
Partons Vite Kaolinien à la sauce Elista (qui leur permet néanmoins de s'attirer enfin les regards extérieurs), ce n'est que parce qu'il ne reflète à mon sens pas l'ensemble de cet album.
La composition d'Elista est particulière, et pourtant elle semble complètement logique. C'est un de ces rares groupes à bénéficier d'un auteur attitré, partie intégrante du groupe, mais qui n'est pas musicien (rendons quand même à Benjamin Peurey sa qualité de "frappeur de mains" créditée sur l'album). Et les chansons s'en ressentent : les mots tombent justes, se répondent, portent déjà la chanson avant même la mélodie (à
Seul et sans défense près, cette chanson reste une énigme pour moi). Quant au chant, il est partagé entre deux voix, celles de Thomas Pierron et François NGuyen. Bonne nouvelle : ils savent s'en servir.
La connotation pop de cet album n'entrave en rien la faculté de ces chansons à happer l'auditeur. On a rajouté des
"papapa-pa" de temps en temps (
Ton Serment et son pavé de bonnes intentions), les sons sont plus doux, c'est la fête de la guitare sèche et les choeurs chantonnent à foison (l'entrainante introduction
La Part de Toi, totalement à l'image de l'album). L'amour reste un sujet principal, le côté fleur bleue déborde de temps en temps (
"Tes baisers je te les vole / Et le reste je m'y faiiiiiiis" dans
Ton Serment), mais Elista a le mérite de multiplier les points de vue : le sirupeux
Devine à la manière d'un slow de fin de vacances (les yeux perdus dans les vagues, c'est bonus) ou le susurré et intimiste
L'Amour Sale...
Au milieu de tout ça, Elista ne se contente pas de servir à la pelle des bleuettes insipides :
La Ballade Criminelle pose des paroles décalées - celles d'un meurtrier - sur une mélodie faussement naïve tandis que l'épicurienne
Des Couleurs A Ta Robe finirait presque de nous convaincre. Enfin, le groupe nous propose toujours des tons un peu plus relevés, notamment sur deux titres particulièrement réussis :
Le Royaume des Cieux, final magnifique aussi bien dans ses arrangements que dans ses paroles et son interprétation, et
L'Amour, la Guerre et l'Imbécile, sortie énervée et sans répit, forcément prenante.
Avec
L'Amour, La Guerre et L'Imbécile, Elista gagne son pari en nous proposant un son plus pop et plus doux, parfois frustrant aussi quand on a aimé la vigueur des albums précédents. Mais à quelques exceptions près - que d'ailleurs, chacun sera libre de choisir - il y a toujours chez Elista de quoi plaire, et ce troisième album prouve que ce groupe est encore capable de nous surprendre agréablement.
TRACKLIST
1. La Part de Toi / 2. La Saint-Valentin / 3. La Ballade Criminelle / 4. Ton Serment / 5. Seul Et Sans Défense / 6. L'Amour, La Guerre et l'Imbécile / 7. Des Couleurs A Ta Robe / 8. A La Manière D'Un Météore / 9. Et Si, Au Pire/ 10. Devine / 11. L'Amour Sale / 12. Le Royaume Des Cieux
Label : Wagram / Sorti le 24 janvier 2011