"On nous dit", nouveau magazine (estival) de TF1, était diffusé pour la première fois jeudi dernier. Bon, les magazines de TF1, ça fait longtemps que j'en n'ai plus regardé, parce que je sais leur qualité et que c'est pas vraiment mon truc. D'ailleurs, souvent quand je zappe, ma borne inférieure est 2. Mais bon, je sais pas pourquoi, j'avais envie de tenter le coup, de voir si, par hasard, on pourrait avoir un truc sympa, ne serait-ce qu'une émission qui se regarde sans trop en demander, une émission d'été en somme.
Déjà,
l'émission est programmée à 23h45 à 1h10, de quoi décourager tous ceux qui ne sont pas en vacances mais aussi ceux qui n'ont pas envie de se maintenir éveillés pour si peu. Le principe de l'émission,
animée par Cécile de Ménibus, est de prendre une idée reçue et de l'infirmer ou l'affirmer. Ce n'est évidemment qu'un prétexte pour broder autour d'un sujet, parce que, la plupart du temps, on se demande qui peut se poser de telles questions.
Après une intro éculée du long speech à un étranger qui attends la fin du laïus pour balancer un "sorry i don't understand" (un truc du genre), Cécile de Ménibus se balade dans la ville pour interroger des passants, pour la plupart des personnes âgées, pour tenter de saisir des réactions plus enjouées et des petites phrases marrantes ; on n'échappera pas quand même aux beaux-gosses qui n'ont pas peur de lancer
leur technique de drague de losers devant la caméra. La présentatrice ne s'en tire pas trop mal,
ça casse pas des briquettes à un canard, mais improviser avec les passants n'est jamais évident. En plus, on aura la chance de passer en revue sa garde-robe pendant toute la durée de l'émission (et ça confirme que les shorts pour les filles, c'est non).
Bon, moi je me suis dit
"j'ai pas vraiment l'impression d'apprendre quelque chose d'extraordinaire, mais si ça peut passer le temps agréablement, pourquoi pas", d'autant plus que j'avais pas non plus un carnet de rendez-vous rempli à cette heure-là. Premier reportage,
"on nous dit que si on mange pas du maroilles, on est ringard", avec dégustation en pleine rue. Attaquer en surfant sur les restes de la vague Ch'ti, de quoi choper les téléspectateurs, c'est finement joué. Sauf qu'après avoir vite dégagé le thème du maroilles, parce que faire un reportage de 5 minutes dessus c'est même pas crédible dans le JT de Jean-Pierre Pernault, on dévie sur le phénomène Ch'ti. Tant qu'à faire. Pour changer.
En fait, on sent le coup venir : si de temps en temps Cécile de Ménibus aborde des sujets qui pourraient être sympa à explorer un peu plus, même sur un ton décalé (les femmes n'ont pas le sens de l'orientation, il y a autant d'alcool dans une dose de whisky que dans une chope de bière), ils sont vite expédiés au profit de l'image qu'elle est jolie et qu'elle brille. "On nous dit que tout est possible à Dubaï", avec diaporama de la ville et de toutes ses grandeurs (c'est joli, mais à part ça...), "On nous dit que les croisières c'est pour les vieux" (
avec des images de croisières bien plus glamour que Papy et Mamie au Croisic), "On nous dit que la France est le pays du Camping" (sujet assez réussi pour sa beaufitude assumée), le tout raconté par une voix off qui ajoute encore
plus de blagues que Pascal Argence.
La vidéo du reportage "On nous dit que pour être une star, il faut être Sexe, Drogues & Rock'n'Roll"
Mais on l'aura deviné, pas question de faire dans le trop intellectuel, et
si ça déborde un peu trop, c'est pas grave. Dès le début, un sujet plein de profondeur, "On nous dit que les plus belles fesses sont au Brésil" (c'est vrai,
on en discutait justement hier avec mon facteur), "On nous dit que pour être une star, il faut être Sexe, Drogues & Rock'n'Roll" qui appuiera sur le côté débauche des stars et qui finira pour dire que non, on n'a pas forcément besoin, regardez Céline Dion (
j'avoue que là j'ai ri très fort), ou encore "On nous dit que le Spring Break est la plus grande fête étudiante au monde", impeccable pour larguer toutes les images possibles de léchages de nichons et de monokinis roses fluo, histoire d'étayer la réponse si besoin était.
L'émission se termine par un sujet plus que paradoxal,
"On nous dit qu'aujourd'hui le sexe n'est plus tabou", qui est déconseillé aux moins de 16 ans, un peu comme à l'époque du reportage final de "Combien Ça Coute"
qui osait *pénétrer* dans les couilles-lisses du monde du X. Reportage qui montre la société d'aujourd'hui, qui ose parler de sexe, au cas où on l'aurait pas remarqué. Mais, ouf, gardons la conscience tranquille, la conclusion dira que oui, c'est toujours tabou, la preuve, t'oses pas dire à ta voisine que hier, t'as crié pour une sodomie bancale
(non, ça c'est moi qui l'ai rajouté, je trouvais ça dans le ton).
Admettons. Admettons que cette émission s'inscrive dans un cadre estival, avec plein d'images de fêtes cul-nu, et prenne le relais d'autres émissions estivales sans grande valeur ajoutée, comme "Ca vaut le détour" qui montrait les images de crash ou "Incroyable mais Vrai" qui épiloguait avec des vedettes has-been sur les qualités du premier skateur uni-jambiste mais au mono-sourcil de moins de un mètre quarante. Le souci est de nous vendre un programme enrichissant. Cécile de Ménibus dit d'ailleurs que certaines infos n'ont pas besoin d'être développées, et servent de lancement. Soit ; on considère donc que savoir si les plus belles fesses du monde sont au Brésil demande de la réflexion, alors. Quant au fait de savoir si on est seul dans l'univers, s'il y a bien des interviews (entre les frères Bogdanoff et le directeur du centre national de recherche sur la question), cinq minutes servent juste à présenter un pan de la question, agrémenté, évidemment, d'images qui font peur parce que si on y croit vraiment, on peut imaginer que ce ne sont pas des lampadaires mais bien des OVNIs. En revanche, on serait passé à côté de la blague du jour donnée par un témoin,
"on a vu un bleu comme il n'en existe pas sur Terre" (ouah le piège).
J'aurais pu fermer la télé. J'ai failli le faire, mais j'ai voulu regarder jusqu'au bout, pour pouvoir en parler. J'aurais pu aussi choisir de ne pas en parler, mais puisqu'on nous a pas dit que c'étaient les Bisounours les chefs de la Terre, j'imagine qu'on peut encore être déçu de certaines choses.
J'avais osé penser que "On nous dit" pouvait être une émission ludique mais divertissante. C'est d'autant plus dommage que c'est pas forcément un cadeau pour débuter une carrière d'animatrice solo.
"On nous dit" qu'il faut pas juger sans savoir. C'est fait.
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La vidéo de l'émission